Eco-anxiété, éco-lucidité : Représentant⋅es du personnel, faites le point et découvrez vos moyens d'action.

Eco-anxiété, éco-lucidité

Un contexte qui incite à questionner les impacts écologiques systémiques sur les conditions de travail

 

 

Pour sa 20ème édition, la semaine de la qualité de vie au travail QVT devient la semaine de la qualité de vie et des conditions de travail QVCT. Cette année, elle  aborde le thème "Transitions et travail, on en parle ?", permettant entre autres, de creuser les perspectives ouvertes par l’Accord National Interprofessionnel (ANI) du 11 avril 2023 sur la transition écologique et le dialogue social. Le CESE révélait au même moment, les résultats de son enquête “Santé au travail : quels défis à relever face aux dérèglements climatiques ?” conduite auprès de représentant⋅es du personnel et d’employeurs. Seulement “35% des répondants constatent que ces sujets sont à l’ordre du jour dans leur entreprise ou administration, alors même que plus d'un tiers sont inquiets face aux changements environnementaux dans le cadre du travail".

 

Face à ces timides avancées et devant l'accélération du dérèglement climatique, la chute de la biodiversité, l’augmentation des pollutions, les pics de ressources, la hausse des coûts notamment énergétiques, la numérisation croissante et les transformations sociales et sociétales induites, il est légitime de se demander comment évolue le monde du travail. Mais quel impact sur la santé et le bien-être des salarié⋅es et des représentant⋅es du personnel ? Comment aider les acteurs du dialogue social à mieux comprendre et vivre le paradigme de l’Anthropocène* dans leur organisation, qui défie la notion même de transition ? Comment mieux percevoir et prendre en compte ce que peuvent ressentir les salarié⋅es face au “business as usual” de leur organisation ou à l’inverse, de leur implication au service de la redirection écologique de leur entreprise ?

L’éco-anxiété prend de l’ampleur dans nos organisations : apprenons à la repérer et la prendre en compte

Face à tous ces questionnements, le Printemps écologique a décidé de répondre à la question de l’éco-anxiété. Gagnant de l’ampleur dans le monde du travail, elle peut se définir comme une anxiété liée à la perception du  dérèglement climatique et plus globalement des enjeux écologiques, et à ses impacts (pollution, réchauffement, perte de biodiversité, incendies, etc…) et se caractérise par une forte inquiétude anticipée vis-à-vis des conséquences à venir. Elle peut s’accompagner de plusieurs émotions (impuissance, peur, perte de sens, colère envers les pouvoirs publics, les entreprises, les pollueurs, ou encore tristesse et résignation). L’éco-anxiété ne devrait toutefois pas être considérée sous un prisme trop médical, elle n'est pas une maladie mentale, même si elle peut engendrer des impacts sur la santé psychologique et physique : l’on devrait plutôt parler d’éco-lucidité, c'est-à-dire d’une lucidité sur l’avenir et d’une étape nécessaire pour agir. 

 

Pour un éco-syndicat, la question est celle de la confrontation de l'éco-anxiété avec les conditions de travail, mais aussi avec l'engagement des représentant⋅es du personnel sur les sujets écologiques. Dans quelle mesure l’éco-anxiété peut, entraver le sens au travail, générer du stress en raison de conflits de valeurs, d’insécurité dans l’emploi ou encore de hautes exigences émotionnelles ? Et ainsi faire augmenter de manière exponentielle certains indicateurs liés aux risques psychosociaux comme le turnover, l’absentéisme ou encore le déficit d’engagement des porteurs de mandat de représentant⋅es du personnel ?

 

Elargissons le DUERP et l’évaluation des risques professionnels à l’éco-anxiété

Pour être en mesure de considérer sérieusement ces questions, le Printemps écologique revendique que ces risques professionnels environnementaux soient intégrés dans le DUERP (Document Unique d’Evaluation des Risques Professionnels) des entreprises et qu’une unité de travail spécifique « acteurs du dialogue social » soit créée pour y répondre. En effet, ce document constitue la pierre angulaire sur laquelle reposent les 9 principes généraux de prévention. Aussi et conformément aux articles L2312-26 & 27 du code du travail, le CSE ou sa commission SSCT (Santé Sécurité et Conditions de Travail) est consulté⋅e chaque année sur le bilan et le programme annuel d’amélioration des conditions de travail. Les élu⋅es ont donc un rôle à jouer : ils doivent être formés à l’évaluation des risques professionnels : physiques, psychosociaux, environnementaux intégrant désormais le risque d’éco-anxiété chez leurs collègues, et mettre en œuvre les actions de prévention adéquates.

L’éco-anxiété est par ailleurs susceptible d’affecter davantage les représentant⋅es du personnel qui ont en charge ces sujets. Comme le rappelle l'enquête menée par Secafi et le Centre Etudes & Prospective du Groupe Alpha en 2015, le niveau de stress mesuré chez les représentant⋅es du personnel s’avérait déjà particulièrement élevé : 57% des femmes et 45% des hommes représentant⋅es du personnel étaient en situation de stress décompensé*. Nul doute qu’avec la suppression des CHSCT et la mise en place des CSE, la crise sanitaire de 2020, ou encore l’absence de moyens humains et financiers accompagnant les nouvelles obligations environnementales des élu⋅es, ce niveau se soit encore accru. 

 

Et maintenant on fait quoi ?

Nous te proposons dans un premier temps, en tant qu’élu⋅e, de faire le point sur ton éco-lucidité liée à ton organisation et au dialogue social environnemental avec ton employeur et vis-à-vis des attentes des salarié⋅es qui te sont remontées.

 

👉 Accéder au questionnaire 

N’oublie pas ! En tant que représentant⋅e du personnel tu as une réelle capacité d’action dans ton organisation, pour mobiliser et fédérer les salarié⋅es autour de ces enjeux d’éco-lucidité, et alerter voire négocier pour leur bonne prise en compte par la direction ! 

Si ces sujets ont suscité en toi de l'intérêt, n’hésite pas à : 

  1. Rejoindre le Printemps écologique pour ne pas agir seul⋅e, trouver des idées et échanger avec les autres élu⋅es de la communauté sur leurs retours d’expériences et pratiques respectives

  2. Partager ce questionnaire en réunion avec les autres élus de ton CSE et en discuter avec eux

  3. Mettre le sujet en avant lors des élections professionnelles ou dans ton mandat 

  4. Porter à la direction la nécessité d’intégrer l’éco-anxiété dans le DUERP

  5. Organiser un atelier sur les risques professionnels dont l’éco-anxiété

  6. Si tu as des questions sur l’évaluation des risques, : 

     

    a) contacte-nous : contact@printemps-ecologique.fr 

    b) Si tu es adhérent⋅e du Printemps écologique, contacte directement  ton ou ta référent⋅e ou pose la question sur notre espace de discussion interne.

 

Pour aller plus loin :

  • Campagne "Tu flippes" ? par notre partenaire l'ONG On est Prêt, pour soulager votre éco-anxiété en prenant soin de soi et soin du monde

Auteur⋅ices : Xavière Canu, experte dialogue social chez Dialogue Équitable et membre du Bureau du Printemps écologique, Manon Laveau, animatrice de la communauté au Printemps écologique et Loïc Marzec, chargé de plaidoyer au Printemps écologique

* L’Anthropocène fait suite à l’Holocène, période géologique au climat stable, qui a caractérisé ces 11 000 dernières années. Il caractérise l’ère dans laquelle nous sommes rentrés lors de la période de la Grande Accélération au sortir de la 2de guerre mondiale, où les activités humaines notamment occidentales ont eu un impact tel, qu’elles sont devenues une force géologique majeure à l’origine du dérèglement du système Terre.
* La notion de stress décompensé correspond à une situation dans laquelle les troubles liés au stress ne sont plus compensés et ont un impact avéré sur la santé des salarié⋅es.

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